Il était environ deux heures du matin lorsque des pluies diluviennes ont transformé Kinshasa en un paysage de désolation. Les rues se sont muées en torrents, les maisons ont été envahies par l’eau, et des familles ont dû fuir précipitamment. Cette tragédie n’était pourtant pas une surprise : des alertes avaient été lancées, mais elles sont restées lettre morte.

Un mois auparavant, Malick Muamba Tshibangu, cadre au Ministère de l’Environnement, avait averti du risque accru de crues. Son appel à la vigilance et aux mesures préventives urgentes n’a pas trouvé d’écho auprès des autorités, relégué à quelques entrefilets dans la presse. Au lieu de préparer la ville, des voix discordantes ont minimisé la menace, opposant des prévisions contradictoires aux données plus alarmantes.

L’inévitable s’est produit. La pluie est tombée, intense et destructrice, les rivières ont débordé, et les populations ont payé le prix de l’inaction. Une fois de plus, Kinshasa est victime d’un manque criant de prévention et d’une gouvernance réactive plutôt qu’anticipative.

Cette pluviométrie inattendue en pleine saison sèche s’explique par des perturbations climatiques exacerbées par le réchauffement planétaire. La migration anormale de la Zone de Convergence Intertropicale, combinée aux effets d’El Niño, a favorisé des précipitations hors saison. À cela s’ajoute l’impact du microclimat urbain : l’îlot de chaleur généré par la densité urbaine crée des conditions propices à des orages violents. Enfin, l’imperméabilisation des sols et l’absence de drainage efficace aggravent les conséquences de ces épisodes extrêmes, transformant chaque pluie en une menace pour les habitants.

Combien de catastrophes faudra-t-il avant que les décideurs cessent d’ignorer les avertissements ? Faut-il attendre une nouvelle tragédie humaine pour que la prévention devienne une priorité ? Ces événements mettent en lumière une absence de coordination entre institutions, un sous-investissement chronique dans les systèmes d’alerte et une défiance persistante envers les experts.

Les discours rassurants ne suffisent plus. Seules des décisions audacieuses et une planification rigoureuse permettront de briser ce cycle de négligence. Car la pluie reviendra, et avec elle, le risque d’un drame évitable.

Par Didier Mbongomingi

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