Kinshasa, 19 août 2025 – Le processus de paix entre la République démocratique du Congo (RDC) et le mouvement rebelle M23, engagé depuis avril à Doha sous médiation qatarie, connaît un tournant incertain. Alors que la date butoir du 18 août pour la signature d’un accord global est désormais dépassée, les négociations se poursuivent dans un climat de méfiance et de tensions persistantes.

Un projet d’accord, partagé récemment avec les deux délégations, dévoile les contours d’un compromis ambitieux. Il prévoit notamment la libération de plusieurs centaines de prisonniers, la création d’une force conjointe intérimaire composée à 50 % de combattants du M23, placée sous l’autorité du ministère congolais de l’Intérieur, et déployée exclusivement dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Cette force bénéficierait d’un mandat de cinq ans, renouvelable, avant une éventuelle intégration dans les structures régulières de l’armée et de la police.

Le texte propose également un retour progressif de l’autorité de l’État dans les zones contrôlées par le M23, avec la nomination de dirigeants locaux intérimaires par Kinshasa, incluant des personnalités suggérées par le mouvement rebelle. Des élections locales sont envisagées pour 2027, précédées d’un dialogue national en 2026. Toutefois, le projet rejette explicitement toute forme de fédéralisme, une revendication centrale du M23, au nom de la restauration de l’unité étatique.

Malgré la signature d’une déclaration de principes le 19 juillet, qui engageait les parties à respecter un cessez-le-feu permanent et à entamer des négociations formelles dès le 8 août, les discussions ont été suspendues. Aucune délégation ne s’est présentée à Doha à la date prévue, en raison notamment du blocage sur la question de la libération des prisonniers. Le M23 exige la libération préalable de 700 de ses membres, conditionnant sa participation à cette mesure de confiance, tandis que Kinshasa n’a encore procédé à aucun geste concret.

Des affrontements ont été signalés dans l’est du pays depuis la signature de la déclaration, mettant en péril la trêve fragile. Les FARDC accusent le M23 de violations répétées du cessez-le-feu, tandis que le mouvement rebelle dénonce des manœuvres militaires offensives de l’armée congolaise. Cette recrudescence des violences alimente les inquiétudes sur la viabilité du processus de Doha.

La médiation qatarie, appuyée par l’Union africaine et les États-Unis, maintient son engagement et affirme que les deux parties ont exprimé leur volonté de poursuivre les pourparlers. Toutefois, l’impasse sur les mesures de confiance, notamment l’échange de prisonniers sous l’égide de la Croix-Rouge internationale, freine toute avancée significative.

Dans ce contexte, l’accord de paix bilatéral signé entre la RDC et le Rwanda à Washington le 27 juin, ratifié par Kigali le 29 juillet, ajoute une dimension diplomatique complexe. Le M23, historiquement lié à Kigali selon plusieurs rapports onusiens, insiste pour négocier son propre accord avec Kinshasa, estimant que le texte de Washington ne répond pas à ses revendications spécifiques.

Alors que les négociations de Doha peinent à franchir un cap décisif, la situation sécuritaire dans l’est de la RDC reste préoccupante. Des milliers de civils continuent de fuir les combats, et la communauté internationale s’interroge sur la capacité des médiateurs à transformer ce projet d’accord en un engagement contraignant. Le temps presse, et chaque jour de retard renforce le spectre d’une reprise généralisée des hostilités.

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