Le 20 août 2025, une atmosphère studieuse régnait dans la salle Léon Kazumba Luaula à Kinshasa, où l’Inspection générale des finances (IGF) recevait les mandataires des entreprises et établissements publics du portefeuille de l’État. Cette rencontre, bien plus qu’un simple échange de civilités, s’est imposée comme un moment stratégique de dialogue sur les dysfonctionnements persistants qui entravent la performance de ces entités. Faible rentabilité, conflits internes, gouvernance défaillante: les griefs sont connus, mais la volonté de réforme semble désormais s’affirmer.
En ouvrant les travaux, Christophe Bitasimwa, chef de service de l’IGF, a souligné l’importance de la continuité et de la vigilance dans l’accompagnement des structures publiques. Il a rappelé que depuis plusieurs années, l’IGF et l’ANEP ont instauré un cadre de concertation régulier, destiné à identifier les obstacles rencontrés dans l’exécution des missions d’encadrement. Ce dialogue, selon lui, doit rester permanent pour espérer des avancées durables.

Traditionnellement cantonnée à un contrôle a posteriori, l’IGF a opéré un virage décisif en instaurant la « patrouille financière », un mécanisme de surveillance préventive et dissuasive. Ce contrôle a priori vise à anticiper les dérives, à conseiller les gestionnaires, à garantir la régularité des actes de gestion et à protéger les entités contre les pressions extérieures. Il s’agit d’un changement de paradigme, où l’encadrement devient un outil de gouvernance proactive.
Les premiers résultats de cette approche sont encourageants. Des améliorations notables ont été observées dans la trésorerie, la qualité des dépenses, la mise en œuvre d’outils de gestion prévisionnelle, et même dans la réduction des tensions sociales au sein de certaines entreprises. Pourtant, les défis restent nombreux. Les conflits récurrents entre présidents de conseils d’administration et directions générales, le non-respect des procédures de passation des marchés publics, et la priorité accordée aux avantages des mandataires au détriment des investissements productifs continuent de miner l’efficacité du secteur.
Pour Christophe Bitasimwa, la bonne gouvernance n’est pas une option, mais une exigence inscrite au cœur de la vision du président Félix-Antoine Tshisekedi. Il a insisté sur la nécessité d’un engagement collectif, où chaque acteur, dans son domaine, contribue à l’amélioration des conditions de vie des citoyens.
Ce message a trouvé un écho chez Patrick Ngulu, secrétaire exécutif de l’ANEP, qui a souligné que la transparence et la redevabilité sont des piliers incontournables pour transformer les entreprises publiques en véritables moteurs de développement, et non en fardeaux budgétaires.
Les mandataires présents ont salué l’initiative, y voyant une opportunité de dialogue nécessaire. Mathieu Muboyahi, directeur général adjoint de l’ANADEC, a exprimé son adhésion à cette démarche, tandis que Fabien Mutomb, directeur général de la SNCC, a rappelé que sans redevabilité et sans réforme de la double tutelle, les entreprises du portefeuille ne pourront jamais remplir leur mission première: produire et générer des bénéfices au profit de la nation.

La rencontre s’est conclue par une séance de questions-réponses, débouchant sur des résolutions concrètes, dont l’élaboration de mémos conjoints pour préciser les axes de collaboration entre les mandataires et l’IGF.
Au terme de cette journée, un constat s’impose: les outils de contrôle et d’encadrement, aussi rigoureux soient-ils, ne suffiront pas sans une réforme en profondeur des structures et une volonté politique ferme d’appliquer les règles. Entre mastodontes budgétivores et potentiels leviers de croissance, l’avenir des entreprises publiques congolaises repose sur la capacité de leurs dirigeants à transformer les intentions en actions.
Par Didier Mbongomingi









