Ce samedi matin, à Doha, un tournant majeur dans le conflit qui déchire l’Est de la République démocratique du Congo a été amorcé. La signature d’une Déclaration de principes entre le gouvernement congolais et le mouvement rebelle AFC/M23 marque une étape cruciale dans la quête d’une paix durable, mais elle soulève d’emblée des divergences d’interprétation qui reflètent la profondeur des tensions persistantes. Alors que les deux parties apposent leurs signatures sur le même texte, leurs lectures respectives en tracent des chemins opposés.

Du côté de l’AFC/M23, le ton est celui d’un compromis pacifique. Le chef de la délégation à Doha souligne la reconnaissance de la voie diplomatique comme unique issue à la crise. Il évoque un cessez-le-feu bilatéral accompagné de la mise en place d’un mécanisme pour définir les modalités pratiques de sa mise en œuvre. Le mouvement insiste également sur la libération des prisonniers et le retour sécurisé des déplacés internes et réfugiés, tout en annonçant une seconde phase de dialogue pour aborder les causes profondes du conflit. Dans les zones sous contrôle de l’AFC/M23, la paix est présentée comme acquise, consolidée par une protection effective des populations.

À Kinshasa, le récit est plus institutionnel et affirmatif. Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement, insiste sur le respect des lignes rouges congolaises, notamment le retrait immédiat et non négociable des forces rebelles des zones occupées et la restauration de l’autorité étatique à travers le déploiement des institutions nationales. Selon Kinshasa, la déclaration repose sur des fondations juridiques solides : la Constitution de la RDC, les chartes des Nations Unies et de l’Union africaine, le droit international, et les résolutions du Conseil de sécurité, notamment la 2773. Elle s’inscrit également dans la continuité de l’accord de Washington et reflète la volonté du président Félix Tshisekedi de rétablir la paix dans l’Est.

Mais à peine les signatures séchées, les contradictions surgissent. Kinshasa revendique un retrait acquis des rebelles, une affirmation immédiatement contestée par la direction de l’AFC/M23 qui dénonce une mauvaise foi flagrante. Cette dissension, dévoilée quelques minutes après la signature, éclaire une fracture profonde dans la compréhension des engagements pris. D’un côté, une lecture diplomatique ouverte à une évolution progressive ; de l’autre, une posture juridique et souverainiste affirmée, fondée sur la restauration immédiate de l’autorité étatique.

L’écart d’interprétation témoigne non seulement des différences de langage et de vision, mais aussi des stratégies politiques que chaque partie tente de légitimer sur la scène nationale et internationale. Si la signature à Doha offre une lueur d’espoir, la réaction des deux camps rappelle que la paix en RDC reste un chantier complexe où les mots, les intentions et les réalités s’entrechoquent dès la première page du compromis.

Par la Rédaction

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