C’est sur les ondes de Top Congo, cette semaine, que le ministre des Finances, Doudou Fwamba, a lancé une annonce qui fait déjà grand bruit: désormais, tous les parieurs devront disposer d’un compte digital, permettant à l’État de suivre les mises et de prélever une taxe sur les gains. Cette déclaration, faite en tant qu’invité spécial, marque un tournant dans la régulation des jeux de hasard en République Démocratique du Congo.

La mesure s’inscrit dans le cadre de la Loi de Finances 2025, qui introduit une taxe de 10 % sur les gains issus des loteries, concours de pronostics et paris sportifs. Les opérateurs de jeux sont désormais tenus de prélever cette taxe à la source et de la reverser au Trésor public. L’objectif affiché est clair: encadrer un secteur en pleine expansion, souvent opaque, et en tirer des recettes fiscales pour l’État.
Mais cette réforme ne fait pas l’unanimité. Dans un pays où le chômage est massif et les salaires souvent insuffisants, les paris sportifs sont devenus pour beaucoup un moyen de subsistance, voire un dernier recours. Pour des millions de Congolais, taxer ces gains revient à pénaliser les plus pauvres, ceux qui tentent de survivre dans un système économique défaillant. Sur les réseaux sociaux et dans les quartiers populaires, la colère monte. Certains dénoncent une mesure injuste, déconnectée des réalités sociales, et accusent le gouvernement de vouloir profiter d’un secteur lucratif sans offrir de solutions concrètes à la précarité.

À l’inverse, d’autres saluent cette initiative. Ils y voient une tentative de freiner une dérive sociale préoccupante. Les jeux d’argent, selon eux, encouragent l’illusion d’un enrichissement facile, détournent les jeunes de l’éducation et du travail, et favorisent l’addiction. Réguler le secteur, le fiscaliser, c’est aussi protéger les plus vulnérables, responsabiliser les opérateurs et préserver l’intégrité sociale.
Ce débat révèle une fracture profonde entre une population en détresse, qui voit dans les paris une échappatoire, et une volonté politique de reprendre le contrôle d’un secteur devenu incontrôlable. Mais entre les deux, une question essentielle demeure: peut-on moraliser une activité sans offrir d’alternatives viables à ceux qui en dépendent pour survivre?

La réforme fiscale des jeux de hasard ne peut être jugée uniquement à l’aune de ses recettes. Elle doit être pensée comme un levier de transformation sociale, accompagnée de mesures concrètes pour lutter contre le chômage, favoriser l’inclusion économique et offrir aux jeunes des perspectives réelles. Sans cela, elle risque de n’être qu’un impôt de plus sur la misère, et de creuser davantage le fossé entre l’État et ses citoyens.
Les parieurs congolais ne demandent pas l’impunité fiscale. Ils demandent à être entendus, compris, et surtout, à ne pas être réduits à une ligne budgétaire. Car derrière chaque mise, il y a une histoire, une espérance, et souvent, une détresse que la fiscalité seule ne saurait résoudre.
Par Thierry Bwongo









