Kinshasa, novembre 2025 – La République démocratique du Congo se trouve aujourd’hui au cœur d’un débat majeur sur sa trajectoire économique et sociale. D’un côté, le Fonds monétaire international (FMI) salue la résilience de l’économie nationale, avec une croissance supérieure à 5 % en 2025 et 2026 et une inflation ramenée à 2,5 %. De l’autre, des voix critiques, comme celle d’Olivier Kamitatu, dénoncent un discours qui, selon elles, occulte la gravité de la crise humanitaire et la persistance de la corruption.

La mission du FMI, conduite par Calixte Ahokpossi, a récemment conclu un accord préliminaire avec les autorités congolaises sur la deuxième revue du programme économique et financier soutenu par la Facilité élargie de crédit (FEC), ainsi que sur la première revue du programme axé sur la lutte contre le changement climatique soutenu par la Facilité pour la résilience et la durabilité (FRD).
Les indicateurs mis en avant sont positifs :

  • Une croissance portée par le dynamisme du secteur extractif ;
  • Une inflation maîtrisée, bien en deçà des objectifs de la Banque centrale ;
  • Un déficit budgétaire contenu grâce à la rationalisation des dépenses et à une meilleure collecte des recettes.

Pour le FMI, ces résultats traduisent une discipline budgétaire et une coordination renforcée entre politiques budgétaire et monétaire, conditions jugées essentielles pour consolider la stabilité macroéconomique et attirer des investissements.

Face à ce tableau, Olivier Kamitatu appelle à « regarder la vérité en face ». Selon lui, les institutions internationales cautionnent indirectement un système prédateur en mettant en avant des chiffres qui ne reflètent pas la réalité vécue par les Congolais.
Les données humanitaires confirment ses inquiétudes :

  • Plus de 26 millions de personnes en insécurité alimentaire aiguë ;
  • 4,75 millions d’enfants souffrant de malnutrition, dont 250 000 en situation sévère ;
  • 1,57 million de femmes enceintes ou allaitantes affectées par la faim.

Pour Kamitatu, parler de performance économique alors que la majorité de la population est confrontée à la faim et à la pauvreté revient à ignorer l’essentiel : la gouvernance, la redistribution des richesses et la justice sociale.

Ces deux approches ne s’excluent pas. Le FMI met en avant la nécessité de bâtir des fondations macroéconomiques solides, sans lesquelles aucun développement durable n’est possible. Les critiques rappellent que la stabilité financière n’a de sens que si elle se traduit en amélioration tangible pour les citoyens.
La première insiste sur la rigueur budgétaire et la crédibilité internationale ; la seconde sur l’urgence humanitaire et la moralité de l’action publique.

Selon le PAM/RDC, 26,6 millions de Congolais — plus d’un quart de la population — sont aujourd’hui confrontés à une insécurité alimentaire aiguë

La RDC ne peut se permettre de choisir entre ces deux visions. Les chiffres du FMI sont réels et utiles pour consolider la confiance des partenaires, mais les alertes de Kamitatu sont tout aussi légitimes, car elles rappellent que la croissance ne vaut que si elle nourrit le peuple.
Aucune des approches n’est mauvaise : elles doivent être considérées ensemble, comme deux facettes d’une même réalité. La stabilité économique et la justice sociale ne sont pas des objectifs concurrents, mais des piliers complémentaires pour construire une RDC résiliente, inclusive et durable.

Par Thierry Bwongo

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